28 janvier1393

 Le Bal des Ardents    

Hôtel de la Reine Blanche

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Lorsque la sulfureuse Isabeau de Bavière (native de Munich) entend parler du re-mariage d'une compatriote, la jeune veuve Catherine de Hainserville, elle se souvient qu'on lui a parlé d'une coutume indigène (françoise... on est au XIV° siècle): le Charivari.

Un charivari permet généralement de tester la résistance du promis à une "prise de tête" (voir l'étymologie dans votre dico) en soulignant l'incongruité éventuelle de son mariage... En l'occurrence, l'incongruité porte sur ses épousailles avec une veuve ! Grands Dieux ! une veuve ?...  Ici, nous avons un volontaire. Le jeune chevalier dit de Vermandois a succombé aux charmes d'icelle et s'apprête donc à affronter ce bizutage bon enfant.

Bref, Isabeau organise son bal, invite sa bande habituelle (le Roi (son mari) et les joyeux lurons qui l'accompagnent ces temps-ci (le comte de Joigny, le bâtard de Foix, Aymard de Poitiers, Hugonin de Guissay etc...) tous de joyeux drilles qui n'hésitent pas à se déguiser en sauvages pour faire rire les dames et égayer les soirées (plumes collées à la poix, chemises de lin enduites de poils (c'est velu un sauvage), bananes dans les oreilles, masque de babouin, tutu en feuilles de palmier, etc... on vous laisse imaginer). Un bon sauvage se devant d'être enchaîné... ils se laissent attacher l'un à l'autre en riant de la situation si grotesque... (pensez donc! monsieur le comte grimé en sauvage! cocasse, non?). Bref, ils rient, font la sarabande, émoustillent les dames... jusqu'à ce que... le duc d'Orléans, cherchant à reconnaître son frère, le Roi Charles VI, parmi ces cinq grotesques "sauvages" enchaînés, approche la lumière d'une torche... ne reconnaît pas... approche plus près... va de l'un à l'autre... et embrase tout ce joli monde ("les chemises [...] se prirent au feu à ardoir ") .

La poix, ça brûle très vite.

Tous morts... sauf le Roi, sauvé par la duchesse de Berry, sa tante, qui l'a "bouté dessous sa gonne" (on l'aperçoit sur la gravure ci-contre -> ) Un autre sauvage, le sire de Nantillet,  malgré ses chaînes, a réussi à plonger dans un cuvier où se rinçaient les hanaps.

Enfin, si le Roi Charles VI s'en tire avec quelques brûlures, on dit aussi qu'il en devient fou (en fait, il l'était déjà:  N'avait-il pas trucidé, l'été précédent, ses compagnons de voyage dans une crise de delirium?). Isabeau se console vite auprès du Duc d'Orléans (on reste en famille...) avant d'abandonner Charles VI et renier son seul enfant encore en vie (sur douze!), le futur Charles VII.

L'Hôtel de la Reine Blanche est ensuite démoli sur "Ordre"... il sera reconstruit plus tard à la fin du XV° ou au début du XVI° siècle. Il sera alors occupé par la famille Gobelin qui a prospéré depuis l'ancêtre Jehan... en épousant parfois la famille Canaye. Bref, ces familles occupèrent, tantôt l'une, tantôt l'autre, au gré des amours et des mariages, l' Hôtel de la Reine Blanche qui était déjà morte depuis longtemps ce 28 janvier 1393.

Les chroniques évoquent cette histoire sous le nom du  "Bal des Ardents".

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